École nationale de musique: l'artiste chinoise Liu Fang en état de grâce
VENDEE MATIN, vendredi 30 avril 2004
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Faciles, le pipa et le guzheng? À entendre Liu Fang, on en a au moins la parfaite illusion, tant la virtuose sait transcender les difficultés d'exécution, toute trace de labour gommée. Les 170 auditeurs présents au conservatoire mardi ne s'y sont pas trompés. Ils sont écouter dans un silence religieux cette artiste inspirée, qui aborde l'interprétation comme un acte sacré, qu'elle joue des piéces remontant à plus de 2200 ans ou aux dernières décennies.
On est, à la lettre, transporté dans l'exotisme serein des paysages surgis de ces musiques aussi "figuratives" que le laissent supposer leurs titres. Avec une grâce aillée et un raffinement extrême, la musicienne fait partager, dans un ruissellement continu de trémolos, les sensations apaisantes d'une pluie qui danse, ou raconte la joie d'un groupe de pêcheurs.
Drame et poésie
Ces tableaux empreints d'une poésie délicate alternant avec des scènes dramatiques, comme Guang Ling Fantasia, que son auteur a écrite quelques minutes avant d'être exécuté... Ou encore avec des pièces martials, où l'on entend chocs d'armures et cris de combattants, entre mort et victoire. Les explications pleines de sensibilité données par la récitante Florence Leclair ont il est vrai utilement préparé nos oreilles à l'expreesivité lyrique de ce répertoire incroyablement pittoresque.
Liu Fang exhale de ses instruments des chants purs aux nuances subtiles. Du pipa, bercé sur ses genoux comme un enfant, cette artiste, frêle en apparence déploie, sans se départir de sa retenue, une énergie insoupçonnée quand elle fait monter le son en puissance. Sa musique, elle la vit, jusque dans ses silences. Et l'auditeur aussi. Intensément. Liu Fang, qui pourrait bien s'établir en France, a offert une prestation originale et époustouflante de virtuosité.